La Société de Gestion de la Rivière Matane et les pêcheurs sportifs doivent une fière chandelle à l’ACPM. Ce n’est pas d’aujourd’hui que ses membres se portent à la défense de la Rivière. Jadis les Roger Desjardins, Bermond Turcotte et Albert Bastien ont donné bénévolement de leur temps pour promouvoir son accès et son aménagement. À la fin des années 1980, les présidents de l’ACPM, Richard Paradis et Michel Savard ont conclu des ententes avec le ministère des Loisirs de la Chasse et de la Pêche pour que l’Association obtienne la gestion du gardiennage de la Rivière. Michel me confia la responsabilité de proposer au MLCP des actions pour prendre le relais du Ministère dans la gestion de la Rivière.
En 1979, MLCP avait créé des ZEC (Zone d’exploitation contrôlé) pour prendre la relève des clubs privés dans le but de garantir l’accès au grand public, des territoires de pêches, de chasse et de piégeage. Le MLCP, dans ces années-là, se questionnait sur la gestion de la Rivière Matane et hésitait sur le bienfondé d’en confier la gestion à son mandataire et société d’état, la S.E.P.A.Q.
Pierre Bernier, alors sous-ministre au MLCP et ami d’enfance, vient me rencontrer à Matane pour en Jaser. Nous discutons sur la possibilité de faire autrement. Je lui fais part de l’expertise développée depuis quelques années par l’A.C.P.M. dans le gardiennage et de son rôle aviseur en matière de protection et de promotion de la pêche sportive : réglementation, calendrier de pêche, aménagement, infrastructure. Pourquoi ne pas confier à une association locale et sans but lucrative la gestion auto financée de la Rivière Matane, en autant que le Gouvernement soutienne son financement par des octrois pour des actions ciblées comme la construction d’infrastructures et la protection du saumon. Alors pourquoi ne pas penser à une ZEC Saumon pour la Rivière Matane.
L’idée fait son chemin et l’A.C.P.M. forme en 1989, le comité de mise en valeur de la Rivière Matane, dont je serai le président jusqu’à la formation du Comité provisoire de la ZEC. Le comité est composé de représentants de l’ACPM, de la Chambre de Commerce, du Conseil Économique Régional, de La Ville de Matane et de la M.R.C. de Matane. Il est entouré de personnes ressources tels que Roger Desjardins, Normand Ouellette, Denis Simard et Alain Turcotte.
Nous sommes en 1989, à l’ère des sommets économiques régionaux et la FQSA vient de tenir un colloque régional. Dans la Voix Gaspésienne du 29 novembre le journaliste Jean Boucher rapporte « Michel Asselin demande que la Rivière Matane soit désigné ZEC, non seulement pour assurer le maintien de l’accessibilité pour tous, mais surtout parce que la gestion par la population locale est la seule garantie pour contrer le braconnage et favoriser la développement économique »
Les consensus et les appuis politiques recueillis ont permis de soutirer les financements requis pour réaliser des travaux majeurs dans les années à venir et former la SOGERM.
En mars 1992, le MLCP confie à la SOGERM le mandat de gérer la Rivière Matane selon le mode d’une ZEC mixte, c’est-à-dire que la ZEC ne sera pas gérée que par des représentants de ses utilisateurs mais aussi par des représentants d’organismes locaux. Pierre-Paul Turcotte devient le premier président avec comme directeur général Réal Soucy. À son début, la ZEC engage 3 employés permanents et crée 17 emplois saisonniers.
Plus d’un million et demi de dollars seront investis entre les années 1990 et 1995 pour la restauration de fosses, la barrière de rétention sur la Petite Matane, la construction de l’épi artificielle de la fosse 2, la gestion des eaux, la signalisation et des améliorations aux infrastructures et équipements.
Je rappelle la restauration du poste d’observation et de la passe migratoire réalisée pendant ces années. Il est impensable 30 ans plus tard, qu’on ne puisse plus observer la montaison du saumon.
Pensant surement à l’impact économique et à l’engouement que pouvait apporter aux touristes de passage à Matane, l’observation de la pêche au centre-ville, le bien nommé Gilles Gagné écrivait, le 27 juillet 1994, dans la Voix Gaspésienne
« Si la Rivière Matane n’existait pas, il faudrait la réinventer »
La reconstruction du barrage au centre-ville, prévue pour bientôt, offre l’opportunité et le moment de parler haut et fort en faveur d’avoir un ouvrage qui favorise le passage du saumon et qui met en valeur notre rivière. Peut-être que mettre des frais d’admission à ceux qui fréquentait le poste d’observation n’était pas une bonne idée, que cela a provoqué une baisse d’achalandage. Mais de là à ne pas reconstruire le poste d’observation, c’est abandonner ce qui distinguait Matane des municipalités de l’Est du Québec : un lieu de rencontre unique de la population locale et des touristes de l’extérieur. Matane, c’est voir pêcher à la mouche en plein centre-ville et contempler la montée du saumon en rivière en se remémorant le temps des « bûcheux ».
Alors Gens de Matane, levez-vous et exigez que nos actifs soient préservés.
Par Michel Asselin®
Janvier 2022
®Ancien Membre et vice-président de l’ACPM et à ce titre, président du comité de mise en valeur de la Rivière Matane. Résident de Matane et directeur-général du CLSC de Matane de 1971 à 1995.